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IL N’Y A PAS D’ÂGE POUR CHANGER LE MONDE

L’INTERVIEW DU FORUM CHANGER D’ÈRE :
DÉBORAH LE BLOAS, FONDATRICE DE CONFKIDS


« Les habitants du futur, nos enfants, ne sont ni éduqués à ces enjeux ni écoutés dans la construction du monde à venir. » C’est sur ce constat que Déborah Le Bloas* lance Confkids en 2017 : des conférences ludiques et pédagogiques où acteurs des transitions évoquent les défis de l'avenir avec un public composé d'enfants. Rencontre avec une femme engagée, convaincue qu’il n’y a pas d’âge pour changer le monde.


Véronique Anger-de Friberg : Déborah, j'aimerais que vous expliquiez aux lecteurs de ConfiNews comment vous avez eu l'idée des Confkids ?


Déborah Le Bloas : Tout d’abord, merci à toi de nous inviter dans ta rubrique. Comme tu le sais, nous portons nos sujets avec beaucoup de convictions et de cœur et c’est toujours une opportunité formidable de les partager. Confkids est le fruit de deux constats. D’une part, les solutions que nous cherchons aux défis du XXIème siècle sont ancrées dans la compréhension de la complexité de notre monde. D’autre part, les nouvelles générations sont les premières à appréhender spontanément ce monde de façon systémique, sans doute parce qu’elles sont nées avec Internet, dans cette époque où toutes nos activités sont soutenues par le digital. Le monde entier et ceux qui le peuplent, tout comme les informations qui y circulent, sont en permanence à quelques clics. Tout est lié. Il y a donc une manne de solutions potentielles dans cette population qui jouit de l’intelligence d’une époque (la sienne propre) et dans les nouveaux usages et modes de pensées qu’ils sont en train d’inventer. C’est ainsi que j’ai imaginé réunir des acteurs du changement à la manœuvre et des enfants qui vivront dans des modèles que nous devons imaginer avec eux, et non simplement pour eux.


Véronique Anger-de Friberg : Les jeunes générations sont les premières impactées par les transformations à l'oeuvre (du changement climatique à la révolution numérique) comment dans un monde aussi anxiogène, alors que les adultes passent leur temps à leur dire que tout est fichu, les aider à avoir confiance dans l'humanité et l'avenir ?


Déborah Le Bloas : J’ai bien peur d’enfoncer des portes ouvertes, car la démarche pour insuffler de l’optimisme et de la dynamique est, selon moi, la même depuis la nuit des temps :


Avant tout : éduquer, sensibiliser. Plus on en apprend sur un sujet, plus on se rend compte que de nombreuses solutions et « poches d’air » existent. C’est encore plus vrai en ces heures de catastrophisme médiatique justifié (mal d’ailleurs) par la course aux audiences

Ensuite : discuter, échanger. Il y a une réelle éco-anxiété chez les jeunes. La première façon de s’en libérer est d’en parler, voire d’en rire. Il ne s’agit pas de trivialiser ou de banaliser, mais de réaliser que ces sujets ne préoccupent pas que nous-mêmes. On se sent plus forts à plusieurs pour les affronter.

Enfin, et c’est au moins aussi important que tout le reste : donner des occasions d’agir. L’angoisse nait aussi de l’impuissance, du sentiment de compter pour quantité négligeable. Montrer qu’on a des occasions d’agir à tous les niveaux et à tout âge donne une grande force.


Véronique Anger-de Friberg : Vous êtes très investie dans le milieu associatif. Je pense notamment à l'inclusion des jeunes délinquants. Pourquoi ce choix en particulier ?


Déborah Le Bloas : Ca n’a pas réellement été un choix à l’origine, pour être honnête. J’y suis entrée à la faveur d’une rencontre avec Stéphane Rodot, fondateur de la compagnie des Tambourlingueurs qui œuvre depuis 20 ans au développement de compétences psychosociales, auprès de mineurs en conflit avec la loi, par la médiation culturelle. Au fil des années il en est arrivé à ce constat que les stratégies de résilience, de créativité, d’agilité, de pensée hors cadres développées par ces jeunes contenaient des trésors d’enseignements.

En particulier pour les acteurs du changement qui recherchent justement ces dynamiques dans le design de solutions. De plus, nous partageons deux convictions profondes : un jeune, même délinquant, est avant tout un jeune. Et personne ne doit être laissé sur le bord de la route. Cela nous a amené à fusionner nos projets et à faire entrer les Confkids dans les prisons pour mineurs et les centres éducatifs. Je tiens à souligner que ce sont eux les offrants et nous – la société - les bénéficiaires de ces échanges.


Véronique Anger-de Friberg : Aujourd’hui, vous lancez une nouvelle action www.enfants2022.fr pour faire voter à la Présidentielle les moins de 18 ans. Est-ce que cette expérience pourra servir de boussole aux adultes pour mieux comprendre les attentes et le niveau d’engagement citoyen de la jeunesse ?


Déborah Le Bloas : Le niveau d’engagement citoyen de la jeunesse est déjà élevé. C’est manifeste sur les questions écologiques, économiques et sociétales. Simplement, ils s’expriment plutôt dans la rue, en créant des collectifs ou des pétitions… plutôt que dans les urnes où il ne sont pas admis. En effet, nous espérons que les résultats de ces élections « Enfants2022 » seront entendus et analysés. Pour être considérés comme valides, pertinents et qu’ils invitent les analystes à s’en saisir, les votes se feront sur un mode proche du scrutin traditionnel : vérification de l’identité par un assesseur et anonymat du bulletin. Il faudra également un nombre de votes significatifs.


Notre plus gros défi est justement d’arriver à fédérer les maisons de la République et les assesseurs autour de cette expérimentation puisque ce sont eux qui donneront accès à la plateforme et animeront ces temps citoyens avec les jeunes : écoles, collèges, et lycées publiques et privés, centres sociaux, centres éducatifs, établissements pénitentiaires pour mineurs… « Enfants2022 » propose d’ailleurs des outils pédagogiques pour les y préparer tout en respectant le devoir de neutralité. Nous avons la conviction que c'est dans l'appropriation par les jeunes des enjeux de notre pays, dans le développement de la pensée critique, dans la prise d'habitude du geste électoral, que réside la meilleure promotion auprès d'eux des valeurs et de la vie démocratiques.


Pour en savoir plus sur Enfants2022 et les Confkids

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