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Mont-Saint-Michel : conserver et protéger ce fabuleux patrimoine naturel et immatériel



Entretien avec Thomas Velter, Directeur Général de l’Etablissement public National du Mont-Saint-Michel

Vous êtes à la tête d’un établissement public qui gère le site du Mont-Saint-Michel. Comment concilier l’imaginaire du site et la réalité de ses usages ?

C’est précisément dans cette articulation que prend naissance la raison d’être de cet établissement public national voulu par l’Etat et les collectivités : conserver et protéger ce fabuleux patrimoine naturel et immatériel, tout en relevant le défi de continuer à émerveiller autant de visiteurs sans que cela ne nuise au site.

Les équipes de l’établissement public sont composées d’experts qui connaissent parfaitement le fonctionnement le site, mais également de nouvelles recrues qui apportent un regard neuf et frais. En cela, nous sommes en mesure de proposer des projets cohérents avec les réalités et les contraintes du terrain, mais aussi pleinement ambitieux et inspirants pour les visiteurs, comme les forces vives de la baie du Mont-Saint-Michel.

Notre maîtrise de l’observation des publics nous permet d’élaborer des projets au plus proche de ce qu’ils attendent de leur expérience sur le Mont, d’où qu’ils viennent. Ou bien au contraire, c’est cette même observation fine qui nous permettra de générer de l’inattendu et d’amplifier tout l’aspect sensoriel et imaginaire du site.

Quelles seront vos priorités dans les prochains mois qui vous permettront de conforter l’attractivité de ce site unique en France ?

Tout d’abord, il nous faut unifier la prise de parole pour mieux s’adresser aux visiteurs. Avec l’appui de l’Etat, nous créons une marque officielle « Mont Saint Michel » au début de l’année 2022. Les différents publics doivent s’y retrouver, or aujourd’hui, il y a un morcellement des responsabilités et une multiplicité d’acteurs qui s’expriment.

Je suis par ailleurs convaincu que nous devons améliorer très nettement l’expérience du visiteur au Mont-Saint-Michel. Le travail est déjà engagé et il est multi-dimensionnel : un accueil humanisé sur site, la création d’un nouveau site internet, l’installation d’un restaurant dans un bâtiment de l’Etat, une offre culturelle renouvelée à l’abbaye, un service public de transports amélioré, et bien d’autres dossiers sont encore sur la table.

Tout cela ne peut s’échafauder seul, bien entendu. C’est la raison pour laquelle nous impliquons tous les acteurs du site, à commencer par les acteurs de l’économie touristique. Nous déclinerons d’ailleurs notre marque mère « Mont Saint Michel » en une marque collective sur laquelle chacun pourra s’appuyer pourvu que notre cahier des charges et nos valeurs soient respectées.




La crise sanitaire et les réflexions sur le monde d’après, vont-elles vous inciter à engager une réflexion sur l’adéquation entre les valeurs du site et un tourisme plus responsable ?

Tout à fait. Nous avons entamé des réflexions pour obtenir des certifications et enclencher avec les professionnels du tourisme des pratiques plus vertueuses. Durant ces deux années particulières qu’ont été 2020 et 2021, les Français étaient encore plus nombreux sur le site du Mont-Saint-Michel qu’en période « normale » hors crise sanitaire. Les mentalités évoluent : on cherche le grand air, le local, le respect de l’environnement, l’authenticité.

Comment l’exigence environnementale peut-elle être mise en œuvre dans un site comme celui du Mont Saint Michel qui accueille des milliers de visiteurs chaque année ?

La qualité et la diversité du patrimoine naturel du Mont-Saint-Michel et de sa baie sont reconnues aux niveaux international, communautaire et national : zone humide d’importance internationale, patrimoine mondial de l’UNESCO, site Natura 2000. Cela nous oblige.

Nous poursuivons quatre objectifs dans le domaine environnemental :

Tout d’abord, valoriser le bilan positif des mesures environnementales et de la gestion écologique du rétablissement du caractère maritime du Mont-Saint-Michel, qui s’est déroulé sur 10 années entre 2005 et 2015 ;


Ensuite, accroître la connaissance de la biodiversité, particulièrement riche ici ;


Par ailleurs, nous envisageons de créer une dynamique beaucoup plus importante en faveur de l’environnement et d’un tourisme vert : création de circuits touristiques de découverte de la biodiversité et de l’environnement au sens large, éducation à l’environnement sur des thématiques spécifiques (zones humides, Natura2000, gestion écologique des milieux, agropastoralisme…), diffusion de supports de sensibilisation (bonnes pratiques, développement durable…), politique de réduction des déchets générés par les touristes.


Enfin, nous nous engageons résolument vers un verdissement de la flotte de navettes de transport au Mont-Saint-Michel et le déploiement de modes de transport doux comme le vélo.


Quelles pourraient être les spécificités de la marque « Mont Saint Michel » ?

Cette marque semble exister à plus de 150 occurrences et pourtant celle-ci sera unique en son genre, grâce à son caractère officiel. C’est une prise de parole qui rassemble plus d’une vingtaine de parties prenantes au projet, appuyée par les ministères, puisque nous disposons déjà du suffixe « .gouv ».

Cette marque traduira toutes les initiatives prises pour le bon fonctionnement du site, sans pour autant remplacer la visibilité des opérateurs du tourisme. Il s’agit plutôt de porter des projets valorisants pour le site, la vulgarisation ou la mise en lumière de certaines missions encore peu connues, conforter n’importe quel visiteur, qu’il soit local ou international, dans l’idée qu’ici, rien n’est fait au hasard et que, au contraire, tout cet ensemble est un écosystème dont il faut maîtriser l’équilibre.

La France protège-t-elle assez son patrimoine culturel ? Les entreprises privées doivent-elles être plus incitées à valoriser le patrimoine ?

Je le pense. Le ministère de la Culture déploie un budget conséquent chaque année pour protéger, réhabiliter, restaurer son patrimoine. Mais le formidable engouement des Français pour leur patrimoine doit pouvoir éveiller les consciences, à commencer par celles des entreprises privées dont vous faites mention. Un nombre grandissant d’entre elles s’emparent du sujet et c’est heureux car toutes les bonnes volontés sont les bienvenues.


Thomas Velter, directeur général de l’établissement public national du Mont-Saint-Michel (nommé en mars 2020, établissement crée en janvier 2020)

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