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J’encourage les pratiques vertueuses des influenceurs



Entretien avec Arthur DELAPORTE, député du Calvados (PS) et co-auteur d’une proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux.





L’encadrement des dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux s’apparente à une préoccupation transpartisane, comme en témoigne l’association du député de la majorité Stéphane VOJETTA à votre proposition de loi. Pourquoi en faire l’objet de la niche parlementaire du Parti socialiste ?


En réalité, le texte que Stéphane Vojetta et moi-même défendons est issu de la rencontre des propositions de loi que nous portions chacun individuellement. Lorsque nous nous sommes rendu compte que nous avions déposé deux propositions de loi sur la régulation de l’influence en ligne, nous avons échangé et nous nous sommes mis d’accord sur les grands principes d’un texte commun. Celui-ci, dont la discussion est prévue en mars, intégrera les points issus de l’examen de ma proposition de loi en commission.


L’encadrement de l’influence fait l’objet d’un foisonnement d’initiatives législatives. C’est pourquoi l’idée est de parvenir à un texte de qualité sur ce sujet de quasi-consensus – à l’exception des députés du Rassemblement national.


L’ambition de la proposition de loi est d’encadrer aussi bien les publications des influenceurs aux millions d’abonnés que celles des micro-influenceurs aux audiences plus modestes. Comment cela se traduit-il dans la proposition de la loi ?


C’est très simple : on élabore un cadre juridique commun à tous les influenceurs. Pour cela, on crée un statut juridique unique d’influenceur qui désigne toute personne publiant du contenu promotionnel en contrepartie d’une rétribution directe ou indirecte. Le critère du nombre d’abonnés n’entre pas en considération.


Surtout, on impose aux influenceurs un certain nombre d’obligations auxquelles ils doivent répondre sous peine de sanctions.


Vous proposez d’interdire aux influenceurs la promotion de certains produits ou services – notamment dans les domaines de la santé, des paris sportifs ou des placements financiers. Pourtant la promotion de ces produits est autorisée sur les canaux de communication traditionnels. Qu’est-ce qui justifie, à vos yeux, un cadre plus strict pour les influenceurs à cet égard ?


Il y a déjà un certain nombre de pratiques interdites aujourd’hui en publicité traditionnelle. Par exemple, on n’a pas le droit d’utiliser l’image d’une personne à des fins de promotion de l’alcool. Or, c’est précisément cette logique d’association de l’image d’une personne au produit dont elle fait la promotion qui se trouve au fondement du métier d’influenceur. Notre proposition de loi vise ainsi essentiellement à réaffirmer et à mettre à jour les normes qui s’appliquent à la publicité à l’heure de l’omniprésence des influenceurs.


Cependant, il est vrai qu’elle s’efforce également d’instaurer un cadre propre aux influenceurs. L’interdiction aux influenceurs de promouvoir les paris sportifs ou les jeux de hasard en fait partie. L’imaginaire du succès que véhiculent les influenceurs, aux yeux des plus jeunes tout particulièrement, entraîne des addictions qui en sont bien éloignées. Du reste, de nombreux pays comme l’Espagne ont déjà sauté le pas.


A contrario, les politiques publiques de sensibilisation et de mobilisation ne gagneraient-elles pas à s’appuyer davantage sur les relais que sont les influenceurs ?


Bien-sûr que si ! L’idée du texte n’est pas de jeter l’opprobre sur l’influence de manière générale. Je souhaite simplement réguler ses dérives. Puisque votre question m’en donne l’occasion, c’est volontiers que j’encourage les pratiques vertueuses des influenceurs comme cela a pu être le cas lors de la crise COVID ou de programmes de mobilisation citoyenne.


Au-delà de l’avancée législative que vous défendez, les services de l’État ont-ils la capacité de lutter efficacement contre les dérives des influenceurs ?


J’ai eu l’occasion d’échanger avec différents acteurs institutionnels. Tous partagent la même volonté de mettre fin aux abus de l’influence sur les réseaux sociaux. Cela étant dit, on ne saurait ignorer le manque de moyens mis à disposition de cet objectif.


Notre proposition de loi s’appuie sur le cadre existant en termes d’outils de régulation et de sanction, à savoir la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et l’Autorité des marchés financiers (AMF).




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