Philippe Benassaya, Maire de Bois d’Arcy, President de l’association Territoires et Prisons, ancien president de la commission d’enquête parlementaire sur les politiques pénitentiaires.

Le 23 janvier dernier, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a dévoilé un plan ambitieux pour réformer le système pénitentiaire français. Ces annonces, faites devant les étudiants de l’École nationale d’administration pénitentiaire (ENAP), traduisent une volonté affirmée de transformer en profondeur nos prisons. Si ces intentions méritent d’être saluées, elles soulèvent aussi des attentes fortes quant à leur mise en œuvre effective.
La différenciation des établissements
Un premier pas vers une meilleure gestion L’annonce de la création d’une prison de haute sécurité pour regrouper les 100 narcotrafiquants les plus dangereux marque un tournant important. Cet établissement, présenté comme « inviolable », sera suivi de deux autres dans les années à venir pour incarcérer les 600 narcotrafiquants les plus dangereux identifiés. Cette mesure répond à une problématique essentielle : isoler les détenus les plus dangereux et garantir la sécurité à l’intérieur des prisons. Cependant, il faudra veiller à ce que ces annonces s’accompagnent des moyens nécessaires pour garantir leur efficacité.
Surpopulation carcérale
Il y a aujourd’hui 80000 détenus pour à peu près 62000 places. Avec 4 000 matelas au sol, la situation reste indigne. Construire de nouvelles places ne suffira pas : il faut repenser la gestion carcérale pour garantir la dignité de tous.
La question de la semi-liberté
Doubler les places de semi-liberté d’ici 2027 Une mesure attendue pour mieux accompagner la réinsertion et désengorger les prisons. Cela nécessite des financements significatifs.
Insertion, probation et lutte contre la récidive
La création des États généraux de l’insertion et de la probation est une mesure qui pourrait redonner espoir à un système en panne. Relancer l’insertion des détenus par le travail et la formation est une nécessité pour lutter efficacement contre la récidive. De même, l’amélioration des moyens alloués à la prise en charge médicale des détenus, notamment pour traiter les addictions, doit devenir une priorité.
Création de la Police pénitentiaire
Une 3e force de sécurité intérieure verra le jour en 2026 : la police pénitentiaire. Une avancée pour renforcer la sécurité, mais il faudra des moyens adaptés pour garantir son efficacité.
Mieux lutter contre les phénomènes de radicalisation
Enfin, le renforcement des moyens pour lutter contre la radicalisation en prison, notamment par la multiplication des quartiers d’évaluation et de prise en charge de la radicalisation (QER/QPR), doit s’accompagner d’une réflexion globale sur l’ensemble des parcours de détention.
En tant que président de Territoires & Prisons, Philippe Benassaya salue les annonces du ministre, qui montrent une volonté d’agir sur les points les plus critiques de notre système carcéral. Cependant, les défis restent immenses, et ces réformes ne peuvent pas se limiter à des effets d’annonce. Les priorités doivent rester claires : renforcer la réinsertion, garantir la sécurité et la dignité des détenus et des agents pénitentiaires, et mettre fin à la surpopulation carcérale. Monsieur le Ministre, il est temps de passer à l’acte.
Comments