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C’est un impératif de proposer une offre politique nouvelle


Entretien avec Laurent Hénart, Président du Parti Radical




Comment analysez-vous le premier tour de cette élection présidentielle ? Au-delà d'une nouvelle évolution du paysage politique, la France semble socialement et territorialement fracturée ? Qu'en pensez-vous ?

Ce premier tour, caractérisé par un bon résultat d’Emmanuel Macron et la montée des extrémismes de droite et de gauche, a été l’expression d’un vote utile et d’une banalisation du vote pour Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. Les électeurs ont fait ce que les partis politiques et candidats à la présidentielle de gauche et de droite n’ont pas réussi : unir leur voix pour donner une chance à leur « camp » de l’emporter et surtout pour battre « l’adversaire ».

Mais ce résultat est aussi et principalement le reflet des fractures au sein de notre pays. Le bloc « anti-Macron » ou plutôt « anti-système » s’est révélé avec les gilets jaunes, mais est diffus depuis bien longtemps au sein de la société française. C’est un vrai risque pour notre démocratie, et il est urgent d’y répondre avec des mesures beaucoup plus fortes que ce qui a été fait jusqu’à présent.

Depuis dimanche dernier, Emmanuel Macron reçoit de nombreux soutiens, parmi lesquels celui de l'ancien Président de la République Nicolas Sarkozy. Au soir du premier tour, Emmanuel Macron a estimé qu'il souhaitait "inventer quelque chose de nouveau pour rassembler les convictions et les sensibilités diverses". Le Parti radical participera-t-il à cette ouverture? De quelle manière?

Oui, il est essentiel de rassembler largement et de tirer les leçons du vote du premier tour des présidentielles. C’est un impératif de proposer une offre politique nouvelle, loin du mythe du parti unique, mais qui au contraire soit ouverte et qui fasse de la diversité des sensibilités une richesse. Les Radicaux ont par exemple toujours défendu les majorités d’idées chères à Edgar Faure. Il faut que nous soyons capables de nous rassembler au-delà de nos appartenances partisanes sur des idées que nous considérons bonnes pour notre pays.

Alors qu'il compte aujourd'hui quinze députés, le plus vieux parti de France ambitionne d'en avoir le double en 2022, afin d'avoir un groupe parlementaire autonome mais "soutenant le pacte majoritaire de gouvernement", si la majorité actuelle devait être reconduite. Où en êtes- vous de vos négociations avec LREM?

Les discussions avec LREM et les autres partis de la majorité présidentielle sont en cours. Mais notre priorité actuelle est bien évidemment la réélection d’Emmanuel MACRON.

Le premier tour de cette élection présidentielle a été marqué par la déroute historique des partis politiques de droite et de gauche présents dans la vie politique depuis le début de la 5ème République. Comment analysez-vous cet effondrement ? Ces formations toujours présentes dans les territoires vont-elles disparaître ou se recomposer ?

Avec l’élection d’Emmanuel MACRON en 2017, le clivage politique gauche/droite est devenu obsolète, ouvrant la voie à une recomposition politique qui n’est à ce jour pas achevée. Au-delà du phénomène du vote utile du premier tour des présidentielles qui a écrasé LR, les Verts ou le PS, nous voyons bien sur les territoires, que ce sont plus la personnalité des élus, leur implantation, qui leur permet de gagner des élections plutôt que l’étiquette de leur formation politique peu mise en avant d’ailleurs par de nombreux élus locaux. Donc oui, il est inévitable que les formations politiques traditionnelles évoluent pour ne pas disparaître.

Emmanuel Macron envisage ainsi de reporter à 65 ans au lieu de 62 ans actuellement l'âge de départ à la retraite, de relever le montant de la retraite minimum à 1 100 euros et de supprimer les régimes spéciaux au profit d’un régime universel. Il qualifie cette mesure de "mesure de justice". Partagez-vous cette mesure?

Les Radicaux ont toujours défendu le régime de retraites par point qui est une réforme de justice sociale. L’erreur d’Emmanuel MACRON a été de vouloir faire cette réforme systémique en même temps que les indispensables mesures à prendre pour assurer l’équilibre du régime des retraites au regard du vieillissement de la population. Si nous voulons protéger le pouvoir d’achat des retraités et des travailleurs, l’allongement de l’âge de la retraite est inévitable comme de nombreux pays voisins l’ont déjà fait, avec naturellement un certain nombre de critères à prendre en compte et qui doivent être négociés comme la pénibilité des métiers.

Parmi les mesures les plus identifiées, Marine Le Pen souhaite « supprimer le droit du sol et limiter l’accès à la nationalité à la seule naturalisation sur des critères de mérite et d’assimilation ». Une mesure qu'elle compte appliquer par le simple vote d'un texte au Parlement, car l'accès à la nationalité n'est pas régi par la Constitution mais bien par la loi. Comment réagissez-vous à cette proposition?

Le droit du sol est un fondement de notre République. Évidemment, pour les Radicaux, cette proposition nous révolte. La France a toujours été une terre d’accueil et a permis la parfaite intégration de nombreux étrangers. Les étrangers sont les boucs-émissaires de l’extrême droite plutôt que s’attaquer aux vrais problèmes persistants d’inégalité sociale et de pauvreté auxquels le projet d’Emmanuel MACRON apporte des réponses de fond, notamment en faisant de l’école une priorité.

Vous partagez avec Emmanuel Macron le combat contre les extrêmes, ses choix d'avenir pour la France, son ambition pour l'Europe et sa capacité à protéger les Français et à diriger le pays dans la crise. Qu'attendez-vous de ce second quinquennat s'il est réélu?

Pour réconcilier les Français avec leurs dirigeants, la tâche est immense. Au-delà des réformes indispensables, ce quinquennat devra impérativement apporter un nouveau souffle à notre démocratie, avec plus de représentativité, plus de contre-pouvoirs, plus de dialogue et de co-construction avec les collectivités, les acteurs de la société civile, les Français.



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